La performance de Tom Hardy en Bane
Dans le dernier volet de la trilogie The Dark Knight Rises (2012) de Christopher Nolan consacrée à Batman, Tom Hardy (Mad Max: Fury Road, Dunkerque, Peaky Blinders, The Revenant…) livre une prestation inoubliable de son antagoniste, Bane. Pour cette première apparition au ciné du personnage, l’acteur a réussi à incarner toute sa puissance, son intelligence et son tempérament. Tom Hardy imprime une signature unique à ce rôle en développant un langage corporel imposant et une diction singulière.
Dans cet article, nous reviendrons sur les coulisses de cette performance hors du commun, de la transformation physique extrême de Hardy à la réception du public, en passant par les détails de son jeu qui ont marqué les critiques et l’histoire du cinéma de super-héros.
La transformation physique de Tom Hardy pour le rôle de Bane
Une prise de masse qui aura des conséquences
Tom Hardy a l’habitude de travailler son corps pour interpréter des protagonistes particulièrement musclés et imposants. Il avait déjà pris 20kg pour le film Bronson (2008), alors que pour le Warrior (2011), il avait suivi un entraînement extrême en sports de combat (boxe, kickboxing, muay-thaï) !
Pour incarner Bane, un personnage réputé pour sa force colossale dans les comics, il a cette fois pris environ 15 kg de masse musculaire en seulement 3 mois. Il a suivi un régime hypercalorique combiné à un entraînement intensif de musculation pour sculpter un corps à la hauteur du terrifiant antagoniste de Batman. Tom Hardy dévoile quelques années après en interview que ces différentes prises de masse ont affecté son corps, qui vieillit plus vite qu’il ne devrait : "Je crois qu'il y a un prix à payer pour tout changement drastique (...) Passer d'un extrême à l'autre a un prix. Je n'ai pas abîmé mon corps mais il est certainement un peu plus douloureux qu'il l'était avant !".
Des effets cinématographiques pour le rendre plus imposant
Les muscles de l’acteur n’étaient pas le seul défi pour le faire correspondre au physique du personnage de comics. En effet, il est non seulement incroyablement musclé dans les bandes dessinées DC, mais aussi beaucoup plus grand que la plupart de ses adversaires.
Christian Bale, qui joue Batman, mesure 1m83, soit huit centimètres de plus que Hardy, qui culmine à 1m75. Pour résoudre ce problème et accentuer l'impression dominatrice de Bane, Christopher Nolan a eu recours à plusieurs subterfuges cinématographiques.
Le réalisateur a notamment privilégié des angles de vue en contre-plongée pour magnifier la stature de Hardy, tout en le faisant porter des chaussures spécialement conçues avec des semelles rehaussées. Ces ajustements subtils, combinés à la posture imposante adoptée par l’interprète, ont permis de donner l'illusion d'un colosse capable de terrasser le Chevalier Noir.
Un costume à la hauteur de son charisme
Son style a été adapté par rapport à sa version dans les comics pour le rendre plus réaliste. Il a donc troqué sa combinaison plongeante pour une veste militaire et un long manteau en cuir. L’objectif de sa costumière était de créer un style entre dictateur et révolutionnaire. Elle s’est notamment inspirée des tenues de l’armée suédoise et des redingotes de la Révolution française.
La caractéristique principale de son costume reste bien sûr son masque. Dans les bandes dessinées, il recouvre l’ensemble de son visage et de son crâne. Mais pour pouvoir le rendre plus expressif, Nolan a choisi de l’adapter pour qu'il laisse apparaître les yeux et sourcils de son interprète.
Son utilité a aussi été un peu transformée : à l’origine dans les comics, il permet à Bane de s’injecter le super-stéroïde Venom, qui lui permet d’augmenter sa taille et sa puissance. Probablement toujours dans un souci de réalisme, son effet est remplacé par un gaz analgésique, qu’il respire pour atténuer ses douleurs liées à son passé.
Il est d’ailleurs possible d’acheter les répliques du masque et du fameux manteau sur des sites en ligne !
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Le jeu d’acteur ambitieux de Tom Hardy
Un langage corporel travaillé
L’acteur a su adapter son jeu de comédien aux contraintes de son masque, qui ne dévoile que le haut de son visage. Celui-ci lui donne un air particulièrement inquiétant et sombre mais empêche aussi de voir toute l’expression de son visage. Il a donc extrêmement joué avec ses yeux et son corps pour transmettre toute la profondeur du villain.
Son regard est saisissant, empreint de violence et de puissance. Son attitude est intimidante, il représente une menace massive, une force brute mais aussi rusée. Car à travers ses muscles imposants et son visage marqué par les séquelles du passé, il cache une grande intelligence, qu’il n’hésite pas à utiliser pour vaincre son ennemi juré. Tom Hardy interprète ainsi un Bane moderne, très convaincant et sincèrement effrayant !
Suite à cette performance remarquable, Christopher Nolan l’a d’ailleurs choisi pour son film suivant, Dunkerque (2017), comportant un autre rôle avec un protagoniste masqué.
Une voix unique pour un vilain hors normes
La manière très particulière dont Bane s’exprime est l’un des éléments qui a le plus marqué le public du film. Non seulement elle est modifiée par son camouflage, qui lui donne un timbre métallique et inquiétant, mais l'acteur a aussi développé un accent très particulier…
Lors d’une conférence de presse, Tom Hardy a expliqué ses inspirations pour donner vie à cette intonation si singulière et son rôle. Pour faire suite au Joker, il devait prendre des risques pour se faire accepter comme le nouveau méchant dans la saga déjà mythique de Nolan. Il avait initialement envisagé des tonalités sombres, sinistres, un peu à la Dark Vador. Mais elles auraient manqué d’originalité et Bane aurait eu un style de méchant très générique. C’est pourtant une figure très forte, invaincue par Batman dans les comics, qui doit sortir du lot.
Pour mettre en lumière la personnalité de Bane, Hardy s’est penché sur ses racines latino-américaine. Il a découvert dans ses recherches un combattant à mains nues d’origine latine : Bartley Gorman, alias le roi des gitans. Le comédien anglais a adapté à sa manière son ton de voix mélodique, mélange d’un peu partout puisqu’il était un voyageur, pour créer un accent unique, saisissant, plein d’intonations remarquables.
Il parvient avec cette voix à rendre l’antagoniste aussi terrifiant que vulnérable. Son ton impose le respect mais son accent laisse paraître son humanité et ses faiblesses, cachées sous son masque.
Ce travail vocal est en contraste parfait avec celui du Chevalier Noir, à qui Christian Bale donne une profondeur extrême lui aussi. Le public était déjà habitué à sa voix sombre et très altérée pour incarner Batman depuis les deux premiers épisodes de la trilogie, il était donc logique de lui opposer un antagoniste avec une voix tout aussi travaillée.
Leurs échanges verbaux sont particulièrement intenses. Les tonalités plus aiguës et mélodieuses de Bane s’opposent harmonieusement à la voix basse et plus monotone du justicier.
Pour son doublage en français, Jérémie Covillault, son comédien de doublage habituel, a dû atténuer les effets d’intonations originales. Comme il l’explique dans une interview pour le site Allo Doublage, l’expression anglaise est très différente des rythmiques françaises. Covillaut a donc modulé différemment sa voix pour bien coller au personnage, tout en faisant honneur au travail de son interprète original.
Des répliques aussi cultes que celles du Joker
Bane n’est pas seulement un super-méchant costaud, dur à cuire, il est aussi très rusé et intelligent. Les scénaristes lui ont donc réservé des répliques marquantes, montrant sa réflexion et sa psychologie. Grâce à sa voix si particulière, il captive l’attention et impose sa vision du monde à travers des remarques cinglantes.
Voici notre top 3 de ses citations :
“Personne ne se souciait de qui j’étais avant que je mette ce masque.”
Cette phrase est l’une des plus révélatrices de sa psychologie. Elle souligne à quel point Bane et le justicier masqué peuvent être similaires. Tous deux sont les produits de vies marquées par la souffrance et l’injustice, façonnées par un monde qui les a ignorés avant qu’ils ne deviennent des symboles.
Bruce Wayne a transformé sa douleur en une quête de justice grâce à ses ressources financières et son entraînement. Bane, lui, a été forgé dans la misère et la violence, devenant ce que Batman aurait pu être dans des circonstances similaires.
Pour les deux protagonistes, blessés par la vie, le masque représente tout : leur vrai visage, leur ambition et leur réputation. Ce bouclier leur permet de transcender leur condition humaine pour devenir des incarnations symboliques. L’homme derrière le camouflage n'est qu’un déguisement, même si, à la différence de Batman, Bane n'a jamais vraiment enlevé le sien de son plein gré.
Cette citation montre aussi la solitude et le rejet qui l’ont façonné. Un homme que la société a abandonné, un paria invisible qui n'a trouvé sa place que dans la brutalité et la destruction. Si Batman porte le masque pour symboliser un idéal de justice, son adversaire le porte comme un rappel permanent de sa propre tragédie. En ce sens, il est une version sombre et déformée de Bruce Wayne, une incarnation de ce que pourrait devenir le Chevalier Noir s’il perdait tout espoir et toute humanité.
“Je suis un mal nécessaire.”
La conviction de Bane en ses propres idéaux et objectifs va bien au-delà de la simple croyance. Son fanatisme frôle le religieux et il est plus que disposé à tout sacrifier, même lui-même, pour remplir le mandat de la Ligue des Ombres.
En bon acolyte, il n’a aucun scrupule à reprendre là où Ra’s Al Ghul a échoué. Il fait de son mieux pour non seulement détruire physiquement Gotham City, mais aussi éliminer tous les puissants de ce monde. Il croit vraiment être « un mal nécessaire » pour débarrasser l’humanité de la corruption de Gotham.
“- Vous êtes dans une bourse ici. Il n’y a pas d’argent à voler !
- Ah oui ? Alors que faites-vous tous ici ?”
Sa réponse au courtier illustre parfaitement son ironie cinglante et son humour noir, aussi incisif que ses poings. Il expose avec une simplicité déconcertante l’hypocrisie d’un système économique où l’argent demeure le centre de toutes les préoccupations.
En posant cette question rhétorique, il souligne non seulement l’absurdité de l’argument du courtier, mais aussi le rôle central de la cupidité dans le comportement des élites qu’il méprise tant.
Cette scène est emblématique de son discours anti-système. L’antagoniste incarne une critique acerbe des excès du capitalisme et de la corruption. Il dévoile le décalage cynique entre les valeurs proclamées par les puissants et leurs véritables motivations. Bane ne se contente pas de semer le chaos : il agit comme un miroir grossissant pour révéler les failles morales de Gotham et de ses élites financières.
On observe aussi dans cette courte interaction le caractère théâtral et calculé du méchant : en quelques mots, il provoque et déstabilise. Sa voix calme et posée contraste avec la violence imminente de ses actions, renforçant ainsi son image de stratège implacable.
Critiques et réception du public autour de la prestation de Tom Hardy en Bane
L’incarnation de Bane par Tom Hardy a largement été plébiscitée par le grand public et les journalistes, dès sa sortie en salles. Il n’était pas facile de reprendre le flambeau du méchant après Heath Ledger en Joker, pourtant il a su relever le défi. L’acteur s’est imposé dans un autre style, plus brutal et terre-à-terre, mais tout aussi réaliste.
La majorité des critiques se sont concentrées sur la voix du personnage. Elle a été jugée difficile à comprendre pour certains spectateurs, entre ses intonations étranges et les altérations provoquées par son masque. Christopher Nolan et la Warner ont d’ailleurs modifié la voix de Bane en post-production pour l’éclaircir suite aux retours de l’avant-première !
Outre le problème de compréhension, la technique vocale utilisée par Tom Hardy était une réelle prise de risque. Ses intonations étranges et aiguës ont pu être moquées par certains, jugeant la performance un peu farfelue, loin des voix sombres et glaciales de méchants classiques. Beaucoup de critiques, à l’inverse, soulignent tout l’intérêt d’un accent aussi spécial pour incarner un antagoniste moins conventionnel et plus caractériel.
Niveau “bad buzz”, les moqueries autour du film se sont d’ailleurs plutôt concentrées sur l’interprétation de notre chère Marion Cotillard, dans la scène d’agonie de son personnage, comme beaucoup s’en rappellent toujours… 🤭
La performance de Tom Hardy a suscité de nombreuses discussions parmi les fans autour de son retour, quant à savoir s’il pourrait reprendre l’interprétation dans un futur reboot ou spin-off, notamment en raison de la popularité croissante des antagonistes DC Comics comme Harley Quinn ou Le Pingouin, avec sa récente série éponyme.
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